L’itinéraire du peintre Luc Peire (1916-1994) est remarquable par son avancée irréversible, presque involontaire, me disait-il, vers l’abstraction, ce qui est le cas de nombreux peintres, mais plus particulièrement vers un « verticalisme abstrait ». Venu de l’expressionnisme, dans le sillage de Constant Permeke, Luc Peire voit son travail se soumettre, presque à son corps défendant, à une stylisation implacable pour aboutir à une abstraction rigoureuse, de lignes verticales, affirmant une œuvre personnelle assimilable à l’abstraction géométrique.
Cette expression abstraite, qu’il voulait empreinte de spiritualisme, Luc Peire la développe sous de nombreuses formes. La peinture, bien sûr, fut d’abord son moyen d’affiner cette recherche. Déjà s’annonce la création par Luc Peire d’une expérience plastique totalement inédite et qui constitue, pour l’art abstrait géométrique, un événement marquant. Les « Environnements » qu’il crée se présentent sous la forme d’une construction rectangulaire, espace clos dont les parois reçoivent des panneaux en formica peints avec des matériaux synthétiques, « graphies » conçues par le peintre. Le verticalisme abstrait des oeuvres se voit démultiplié à l’infini par des miroirs qui habillent le sol et le toit de l’édifice. La magie de cette construction plonge le visiteur dans un vertige sans fin, l’attire dans un espace illimité, l’oeuvre plastique n’est plus objet de contemplation, elle se métamorphose, pour le visiteur, en espace incommensurable, infini.
Dans l’espace public, je mets l’accent ici sur la « place carrée » de Marne la Vallée devenue « Place Salvador Allende » pour laquelle Luc Peire se voit proposer la réalisation d’un tableau à l’échelle de la ville en 1985. Davantage familier des ateliers de gravure eyt de l’échelle du tableau de chevalet, Luc Peire a su se hisser à l’échelle du monumental sans perdre la spécificité de sa recherche plastique.
Luc Peire dans l’Encyclopédie audiovisuelle de l’art contemporain
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