Albert Féraud (1921-2007) a forgé la majorité de son oeuvre dans son atelier de Bagneux. Diplômé des écoles des Beaux-arts de Montpellier, de Marseille et de Paris il obtient le premier grand prix de Rome de sculpture en 1951. À partir de 1960, avec ses amis César et Guino rencontrés dans l’atelier d’Alfred Janniot, il découvre toute la liberté que peut offrir la récupération dans les casses de voiture ou les décharges industrielles. Le marbre ou le bronze sont des matériaux bien trop chers pour ces jeunes artistes.
Atelier d’Albert Féraud Bagneux 1995
Lui rendant visite à Bagneux, je le découvre engoncé dans ses habits de forgeron, la tête couverte par le heaume du soudeur, régnant sur un univers de machines industrielles, prêtes à emboutir, couper, casser. Parler d’atelier apparaît dès lors un terme impropre. C’est d’une véritable usine qu’il s’agit. A l’intérieur comme à l’extérieur de cet atelier industriel, sculptures achevés et ferrailles abandonnées se confrontent. Où se trouve l’œuvre ? Dans cette forme emboutie, déchirée ou bien dans ces morceaux mélangés à même le sol ? Albert Féraud vivait sur cette frontière entre le déchet et l’œuvre, entre le hasard et la création.
Il m’emmène dans une décharge industrielle proche de chez lui. L’espace est immense encombré par des montagnes de déchets métalliques en tous genres. Féraud y trouve joyeusement son plaisir et son compte. Voilà sa véritable carrière de marbre. Son Carrare est ici, dans ce rebut de la société industrielle.
Féraud fut membre de l’Institut, au sein de l’Académie des Beaux-arts. Difficile de l’imaginer en habit vert bien longtemps. C’est en tablier de forgeron qu’il vivait au quotidien loin des mondanités du quai Conti.
Avant de le quitter, en guise de souvenir, il ne me signe pas un dessin ou une carte. D’un coup de marteau précis et franc, il marque au poinçon une plaque d’acier, mon seul autographe métallique…
Albert Feraud dans l’Encyclopédie audiovisuelle de l’art contemporain
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