Expositions·Médias

« Manifesto of Fragility » Lyon 2022

« Conçue par les conservateurs Sam Bardaouil et Till Fellrath comme un « manifeste de fragilité », la Biennale place la fragilité au cœur d’une forme générative de résistance enhardie par le passé, réactive au présent et prête à l’avenir. »

La 16ème Biennale de Lyon élève sa perspective à un panorama méta-historique à travers des prêts importants et de nombreuses institutions culturelles de Lyon, telles que le Musée des Beaux-Arts de Lyon, le Musée de Lugdunum et les théâtres romains, et les Musées Gadagne.

Avec la conviction que le dialogue est crucial pour un avenir plus équitable et durable, la Biennale commencera à se dérouler plusieurs mois avant l’ouverture de septembre 2022 à Lyon grâce à des collaborations avec plusieurs institutions partenaires dans les villes à l’international qui se poursuivront jusqu’à la fin de 2023.

Notre fragilité est peut-être l’une des rares vérités universellement ressenties dans notre monde divisé. Nulle part cela n’est plus évident que sur et dans le corps. Racialisé, genré, colonisé ou appauvri, le corps est le premier de nombreux seuils où les conflits font rage et se résolvent, la maladie s’infecte et s’atténue, et la vie dans toute sa complexité, du moins dans un certain sens, commence et se termine. Nos communautés, tendues par les troubles civils croissants provoqués par le refus de se plier aux injustices séculaires et aux inégalités endémiques, provoquent dans leur fragilité un sentiment accru de frénésie sociétale.

Que ce soit dans le corps meurtri d’un manifestant ou dans le ciel de cendres sur la surface enflammée de la terre, notre conscience de notre précarité commune a rarement été plus tangible ou visible. Notre fragilité est inévitable.  » Publication officielle de la Biennale de Lyon

Manifesto of fragility – un monde d’une promesse infinie
Hans Op de Beeck : les fantômes de la liberté
Usine Fagor
Biennale d’art contemporain de Lyon
14 septembre — 31 décembre 2022
Usine Fagor

Expositions

Hans Op de Beeck : les fantômes de la liberté

Un des hauts lieux de la Biennale d’art contemporain de Lyon se trouve sur le site des anciennes usines d’électroménager FAGOR, fleuron passé de l’industrie au cœur de l’histoire ouvrière lyonnaise, dans le quartier de Gerland. La Biennale y dispose d’un espace de 29000 m2. C’est dire combien chaque hall construit sur ce site peut être comparé aux immenses studios d’un empire Hollywoodien. L’installation des artistes peut y prendre alors des dimensions hors du commun.

We were the Last to Stay, 2022 Biennale d ‘art contemporain de Lyon

We were the Last to Stay

L’artiste Belge Hans Op de Beeck a investi un de ces halls pour y créer un univers dont il nous faut tenter de décrypter l’état. Camping abandonné grandeur nature, quelque part entre un campement nomade improvisé de caravanes et un parc urbain délabré avec une aire de jeux et un étang ? On y trouve aussi un potager et un lieu de réparation pour les voitures.

Mais à cette description manque l’essentiel : l’ensemble de ces scènes semble figé dans le temps, recouvert d’une couche de poussière grise qui s’infiltre partout, ne laissant aucune chance d’y découvrir un élément vivant, coloré. Quelque chose s’est passé mais on en ignore la nature. Le titre de l’installation nous donne un indice : « Nous étions les derniers à rester ».

Déjà lors de la Biennale de 2015 une œuvre forte habillait sur l’affiche le thème général de « La vie moderne ». Assurément cette image clef donnait le ton de la manifestation : cette cité balnéaire, aux couleurs joyeuses des parasols envahissant la plage surpeuplée. Surpeuplée ? Non ! A y regarder de près, ce qui semblait être une foule n’est qu’une vue que nous y projetons. L’endroit était tragiquement désert. La vidéo de Yuan Goang-Ming  « Landscape of energy » avait été réalisée dans les mois qui ont suivi le tremblement de terre de 2011, au large de la côte nord-est du Japon et qui avait conduit à la quasi-destruction de la centrale nucléaire de Fukushima. Les lents panoramiques filmés par des drones à Taïwan traversaient les résidences abandonnées de Taichung jusqu’à l’école élémentaire d’Orchid Island avant de longer la côte balnéaire de South Bay, elle-même dominée par une centrale nucléaire.
Aujourd’hui Hans Op de Beeck a délaissé la couleur pour ne conserver que ce gris obsédant, signifiant que nous découvrons un « après », mais un après quoi ?

We were the Last to Stay, 2022 Biennale d ‘art contemporain de Lyon

Manifesto of fragility

Peut-être une communauté vivant à la marge de la société avait-elle décidé de vivre ici, voire survivre dans des conditions précaires, refusant les contraintes folles d’un univers dont les valeurs leur apparaissaient sans valeur ? Mais cette hypothétique communauté a disparu. Le monde vivant en général s’est trouvé totalement éradiqué également. Serait-ce, comme dans la Biennale de 2015, le résultat d’une catastrophe nucléaire, civile ou militaire ?
Dans ce climat étrange que génère la scénographie de Hans Op de Beeck, on pense également aux installations créées par Anne et Patrick Poirier, notamment avec « Danger zone » (2001) nous plongeant dans un futur inquiétant (en l’an 2238) : « Nous avons commencé, disent-ils, à travailler sur les ruines antiques mais seulement comme métaphore et non comme modèle. Les ruines représentent la fragilité des civilisations. » La fragilité est le maître mot de la Biennale dont le titre générique Manifesto of fragility souhaite associer toutes les créations des artistes.

Dans l’univers créé par Hans Op de Beeck l’incertitude règne. Seuls les fossiles de cette vie détruite nous rappellent qu’ici une forme liberté à résisté. « Nous étions les derniers à rester » témoigne, à travers ces vastes scènes, d’un monde anéanti ou l’espèce humaine s’est trouvée foudroyée. Les visiteurs de la Biennale deviennent alors des explorateurs venus d’ailleurs pour tenter d’invoquer ces fantômes de la liberté.

Manifesto of fragility – un monde d’une promesse infinie
Hans Op de Beeck : les fantômes de la liberté
Usine Fagor
Biennale d’art contemporain de Lyon
14 septembre — 31 décembre 2022
Usine Fagor