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Philippe Scrive : Les sculptures meurent aussi …

Bien que le film documentaire de Chris marker et Alain Resnais, en 1953, « Les statues meurent aussi » abordait un autre sujet que celui dont il est question ici, il m’a semblé possible de paraphraser ce beau titre de film pour évoquer le sculpteur Philippe Scrive.

Philippe Scrive

Si Philippe Scrive vit en France depuis de nombreuses années, il n’est pas inutile de rappeler qu’il vient du grand Nord canadien. Cette composante de sa personnalité a joué un rôle déterminant dans son œuvre de sculpteur. Les vieilles photos noir et blanc qu’il me montrait il y a quelques années retracent cette vie avec les grands espaces, les forêts, le transport des énormes billes de bois par des attelages de chevaux à travers les forêts.

Pour une sculpture indestructible

Toute cette mémoire de jeunesse, l’artiste l’a mise en valeur au travers d’une œuvre où ce bois fut le matériau privilégié. Privilégié, mais pas unique. En effet Scrive a utilisé également des matières plastiques dans une période de son travail. Mais le naturel est revenu en force et la dimension totémique de l’œuvre s’affirme. Au Musée d’art contemporain de Dunkerque, le sculpteur a érigé un portique monumental qui donne le sentiment d’être tout à fait indestructible.
Ainsi, Philippe Scrive appartient à cette catégorie de sculpteurs pour lesquels l’œuvre doit être signalétique, repérable, indestructible. Loin de l’éphémère, ce travail s’inscrit dans le temps et dans l’espace comme une volonté de durer, comme une trace de civilisation, peut-être comme les sculptures de l’Ile de Pâques. Pour Philippe Scrive, l’art est une activité symbole de paix. Raison de plus pour qu’elle soit faite pour durer.

Mort d’une sculpture

Fontaine sculpture Philippe Scrive Montreuil

Aujourd’hui, le sculpteur connaît une difficulté douloureuse : la sculpture-fontaine installée depuis de nombreuses années à Montreuil vient d’être démontée contre sa volonté pour la restructuration de la zone urbaine. Les éléments de cette œuvre imposante (18 m x 7 m) sont stockés provisoirement dans les services de la voirie de Montreuil en attendant des jours meilleurs.
La ville de Montreuil explique les raisons de ce déménagement ainsi :
« Un certain nombre de contraintes techniques et financières majeures ne permettent pas le maintien de la fontaine sur la place (nivellement de la place dû à l’accessibilité du métro, maintien du patrimoine arboré), ainsi que sa remise en état complète (la fontaine n’était plus en eau depuis 2003, le poids des dalles de granit ayant fortement endommagé la fontainerie). Ainsi, les services de la ville ont chiffré à plus de 490 000 € le budget nécessaire à sa remise en état et à sa réinstallation. En la période, les questions sociales et humaines font pour nous force de priorité, d’autant plus que cette fontaine représentait déjà plusieurs dizaines de milliers d’euros d’entretien annuel. »

Ce problème illustre la difficulté que rencontrent parfois les artistes pour le respect de leur droit d’auteur sur une œuvre. Il nous donne également la mesure de la relative éternité d’une œuvre. Peut-être pose-t-il également la question du regard porté sur l‘art d’une époque ?
Les œuvres de ces sculpteurs, souvent beaucoup impliqués dans le « Un pour cent » consacré à l’art dans les bâtiments publics, ne font peut-être pas l’objet du même respect que d’autres œuvres « plus contemporaines ». Il y a quelques années, le sculpteur Marcel-Petit, de la même génération que Philippe Scrive, avait connu un problème étonnant.
Marcel Petit avait réalisé en 1977 deux sculptures monumentales en béton pour le lycée d’Epinay-sur-Seine, sur commande publique. Vingt ans plus tard, la DDE confiait à un architecte le ravalement et la rénovation des bâtiments. «Comme les murs ont été peints en rose, mes deux sculptures ont été badigeonnées d’un rose crémeux et surmontées d’un chapeau blanc grotesque», s’indignait Marcel Petit, reprochant à l’architecte d’avoir «refusé toute identité propre à l’artiste». Le sculpteur avait, je crois, gagné son procès.

Philippe Scrive dans l’Encyclopédie audiovisuelle de l’art contemporain

Photos Wikipédia et Philippe Scrive


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Un commentaire sur “Philippe Scrive : Les sculptures meurent aussi …

  1. Le fait que cela soit sous la mandature de Dominique Voynet que l’oeuvre de mon père ai été mise au placard me dérange d’autant plus que j’ai longtemps été chez les Verts.

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